vendredi 18 mars 2011

Le mutisme : diverses formes !

L' État pathologique d'un sujet qui, ne présentant aucune lésion des organes de la phonation ni des centres nerveux du langage, ne fait pas usage de la parole. Mutisme des schizophrènes, des simulateurs; mutisme hystérique; mutisme passager des timides. Avant cela il n'était venu à la pensée de personne que la fille (...) fût folle. Extérieurement elle était comme tout le monde, sauf son mutisme presque absolu (Renan, Souv. enf., 1883, p.50):

1. La réaction de mutisme est une des plus anciennes réactions de défense de l'organisme vivant (...). Un simple silence peut couvrir des effondrements profonds dont la gravité se révélera un jour. Qu'il suffise d'évoquer ici les ravages sournois de la schizoïdie.
Mounier, Traité caract., 1946, p.480.
b) Synon. de mutité. Le mutisme est ordinairement une suite de la surdité de naissance (Ac. 1835-1935).
2. P. ext. Attitude d'une personne qui est habituellement silencieuse ou qui, dans des circonstances particulières, s'abstient volontairement de parler. Visiblement intéressé par notre conversation, il s'efforce d'abord de conserver la correction et le mutisme britanniques (Michelet, Chemins Europe, 1874, p.6). Les visages [de Mme Archambaud et de Maria] étaient durs, les gestes nerveux. Le mutisme des deux cuisinières semblait ne présager rien de bon (Aymé, Uranus, 1948, p.19):
2. ... si Pétain, au cours des audiences de la Haute Cour, a opposé un mutisme systématique aux questions qui lui étaient adressées, il n'en a pas moins fait soutenir que sa politique avait eu pour but de «maintenir» la France en attendant notre libération...
Procès Pétain, 1945, p.1122.
SYNT. Mutisme dédaigneux, hostile, obstiné; opposer un mutisme (+ adj.) à qqn; s'enfermer, se retrancher dans son mutisme; sortir de son mutisme.
− Fait de ne pas donner de ses nouvelles:
3. Croisset, nuit de mardi 12 novembre 1878. Mon bon, Je commence à la trouver mauvoise! Pourquoi pas de nouvelles? Que signifie votre mutisme? (...) Quand viendrez-vous, nom de dieu?
Flaub., Corresp., 1878, p.132.
− P. anal. [En parlant d'un animal] Cet Américain (...) qui, à force de vivre avec les poissons, semblait en avoir emprunté le mutisme (Toulet, Demois. La Mortagne, 1920, p.69).
3. Situation d'une personne, ou d'un ensemble de personnes qui, volontairement, ne s'expriment pas ou que l'on empêche de s'exprimer. Réduire la presse au mutisme. L'empire avait frappé la France de mutisme; la liberté restaurée la toucha et lui rendit la parole (Chateaubr., Mém., t.3, 1848, p.14):
4. [L'opinion publique] interprète certaines réticences de l'état-major dans le sens que vous aviez prévu: et le tour est joué. Aujourd'hui, on a été jusqu'à faire courir le bruit que l'Allemagne, au dernier moment, aurait imposé ce mutisme héroïque à nos officiers!
Martin du G., J. Barois, 1913, p.416.
B. − P. anal. [En parlant d'inanimés]
1. Littér. Caractère de ce qui est silencieux (v. muet II A 1). Lorsque nous faisions halte, nous étions saisis par ce mutisme effrayant des espaces infinis qu'a ressenti Pascal (Jammes, Nuits qui me chantent, 1928, p.115).
2. Au fig. Caractère de ce qui ne fournit aucun éclaircissement concernant une matière, une question particulière (v. muet II B 2):
5. ... le mutisme des textes, à cet égard, est certainement la conséquence de la difficulté de donner au code des préséances un rang individuel à un fonctionnaire qui peut, comme nous le verrons à ses attributions, cumuler tant de fonctions diverses, propres ou déléguées...
Baradat, Organ. préfect., 1907, p.167.
Prononc. et Orth.: [mytism̭]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1. 1741 «état d'une personne muette» ([P.-F. Guyot Desfontaines], Observations sur les écrits mod., 26, 117 ds DG); 2. 1801 «attitude d'une personne qui ne parle pas, qui s'impose le silence» (Mercier Néol.); 3. 1883 méd., psychol. (Renan, loc. cit.). Dér. sav. du lat. mutus «muet»; suff. -isme*. Fréq. abs. littér.: 257. Fréq. rel. littér.: xixe s.: a) 129, b) 412; xxe s.: a) 452, b) 489.

Définition des soins palliatifs - EAPC

"Les soins palliatifs sont la prise en charge active et globale des patients dont la maladie ne répond pas au traitement curatif. La maîtrise de la douleur, d’autres symptômes et des problèmes sociaux, psychologiques et spirituels est primordiale.

Les soins palliatifs consistent en une approche inter-disciplinaire et couvrent le patient, la famille et la communauté dans leur champ d’application. En un sens, prodiguer des soins palliatifs c’est offrir le concept de prise en charge le plus élémentaire, c’est-à-dire pourvoir aux besoins du patient où qu’il soit pris en charge, que ce soit à domicile ou à l’hôpital.

Les soins palliatifs affirment la vie et considèrent la mort comme un processus normal; ils n’accélèrent pas la mort et ne la retardent pas. Ils ont pour but de maintenir la meilleure qualité de vie possible jusqu’à la mort." (1998)
Définition des soins palliatifs

Les soins palliatifs sont destinés à la personne en fin de vie, considérée comme vivante jusqu’aux derniers instants. Ils tendent à assurer l’accompagnement global du patient et de son entourage, tant au niveau de la gestion des symptômes physiques et de la douleur que d’un soutien psychologique ou spirituel.

Le terme "palliatifs" provient du latin pallium signifiant le manteau, celui qui protège, réconforte. Mais les soins palliatifs vont au-delà d’un "réconfort" : ils sont la combinaison de multiples facettes des soins, tenant compte de la souffrance globale du patient.

La législation belge décrit plus précisément les soins palliatifs comme étant "l’ensemble des soins apportés au patient atteint d’une maladie susceptible d’entraîner la mort une fois que cette maladie ne réagit plus aux thérapies curatives. Un ensemble multidisciplinaire de soins revêt une importance capitale pour assurer l’accompagnement de ces patients en fin de vie, et ce sur les plans physique, psychique, social et moral. Le but premier des soins palliatifs est d’offrir au malade et à ses proches la meilleure qualité de vie possible et une autonomie maximale. Les soins palliatifs tendent à garantir et à optimaliser la qualité de vie pour le patient et pour sa famille, durant le temps qu’il lui reste à vivre." (Extrait de la loi relative aux soins palliatifs du 14 juin 2002).

La définition belge des soins palliatifs est complétée par les réflexions issues d’organismes référents en la matière, tels que :

Définition de l’Organisation Mondiale de la Santé – OMS
Définition de l’Association Européenne des soins palliatifs – EAPC
Définition de l’Institut National d’Assurance Maladie Invalidité – INAMI
Définition de la Société Française d’accompagnement et de soins palliatifs - SFAP.

http://soinspalliatifs.be/

vendredi 4 mars 2011

L'imago...

J. Lacan définit le complexe comme la fixation d’une " imago", représentation inconsciente d’une réalité déterminée (le sevrage, l’intrusion, l’Œdipe), intégrée par le sujet à travers « un procès dialectique qui fait surgir chaque forme nouvelle des conflits de la précédente avec le réel » (p. 28). Or, ce sont certaines expériences sociales, comme l’arrivée d’un petit frère, inscrites dans une « structure culturelle de la famille » (p. 24) déterminée, telle la société patriarcale du début du XXe siècle, qui exigent « une objectivation supérieure de cette
réalité ». Cela implique par conséquent « que le complexe est dominé par des facteurs
culturels ».
Couramment appellé ainsi, l'Imago traite du malaise issu de « la séparation prématurée » du nouveau-né de la matrice intra-utérine, séparation constitutive du complexe du sevrage et « que nul soin maternel ne peut compenser » (p. 34).
A la nostalgie (Sehnsucht) freudienne du père de la horde, Jacques Lacan ajoute la « nostalgie de la mère » ressentie d'une part innée : « animal à naissance prématurée » qu’est l’homme. Or, si cette imago maternelle n’est point sublimée afin de répondre aux exigences de la réalité extérieure mais résiste au contraire à ces exigences..., elle devient alors « facteur de mort » (p. 35).
Telle est donc l’explication lacanienne dans cet article de la tendance psychique à la mort, se révélant dans certaines pratiques symboliques comme la sépulture et toutes les autres « nostalgies de l’humanité » mais aussi dans certains suicides, certaines toxicomanies et anorexies, où le sujet cherche à retrouver l’imago de la matrice intra-utérine.
A cette divergence théorique entre S. Freud et J. Lacan au sujet de la tendance psychique à la mort se noue celle au sujet du narcissisme.
Sigmund Freud , lui, émet l’hypothèse d’un "narcissisme primaire" dont la définition s’oppose à la conception lacanienne de l’imago maternelle : « La naissance n’est pas vécue subjectivement comme séparation de la mère, car celle-ci est, en tant qu’objet, complètement inconnue du fœtus mais entièrement narcissique »(5). Les instances du surmoi, de l’idéal du moi et du moi idéal en sont les héritiers, les métaphores de ce narcissisme primaire à jamais perdu dans lequel le sujet se suffit à lui-même, et inclut la totalité du réel!
L’auteur des Complexes familiaux rejette cette hypothèse freudienne parce que le "narcissisme" présuppose l’existence de " l’image de soi" qui est absente de la structuration subjective du petit d’homme du moins jusqu'au stade miroir. De fait, afin de surmonter le complexe du sevrage doit advenir le complexe d’intrusion soit la rencontre ou plus précisément " l’identification avec l’image du semblable" durant cette phase du miroir, et pour que le morcellement du corps se dissipe et que le masochisme qu’implique la nostalgie de la matrice se sublime en un sadisme dirigé vers les objets environnants et notamment « l’identification au frère […] fournit l’image qui fixe l’un des pôles du masochisme primaire. Ainsi, la non-violence du suicide primordial, engendrera la violence du meurtre imaginaire du frère. » (p. 40). Tandis que Sigmund Freud pose l’hypothèse d’un narcissisme originaire, Jacques Lacan défend l’avènement d’une phase narcissique inscrite dans ce registre de l’image, et seule l’intervention d’un troisième terme, l’imago paternelle, cette instance supra-individuelle, pourra conduire le sujet hors de cet univers narcissique!!!

La continuation de notre tour d’horizon des premiers écrits lacaniens nous permettra d’introduire plus longuement cette phase oedipienne durant laquelle le sujet s’inscrit dans le registre du symbolique. Toutefois, nous pouvons souligner ici que si le concept de symbolique est absent de cet article de Jacques Lacan, nombre de ses formulations le préfigurent. Ainsi, lorsqu’il souligne que la famille établit « entre les générations une continuité psychique » à travers « la transmission de la culture » (p. 25), nous pensons que la connaissance sociologique de Jacques Lacan lui permet d’entrevoir d’ores et déjà cette dimension essentielle de l’être humain qu’est le symbolique, ce qui nous autorise peut-être à atténuer l’effet de rupture de ‘‘son retour à Freud’’.

(1) « J. Lacan, De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité », note de lecture pour la Revue - Interrogations- , n°3, décembre 2006
http://www.revue-interrogations.org/article.php?article=64

(2) Nous ne pouvons que nous rallier à ce titre aux travaux de M. Zafiropoulos (Lacan et les sciences sociales, Paris, PUF, 2001) et du Centre de Recherche Universitaire qu’il dirige, Psychanalyse et Pratiques Sociales.
(3) E. Durkheim, « Le problème religieux et la dualité de la nature humaine », Bulletin de la Société française de philosophie, 1913, 13, p. 91.
(4) Dans la préface à la seconde édition des Règles de la méthode sociologique, E. Durkheim définit la sociologie comme « la sciences des institutions, de leur genèse et de leur fonctionnement » (Paris, Flammarion, 1988, p. 90).
(5) S. Freud, Inhibition, symptôme et angoisse (1925-1926), Paris, PUF, 1965, p. 54.